J’ai 27 ans. C’est pathétique à 27 ans de pleurer à cause de notre père. Pathétique, de réaliser que, sans qu'il ne le sache, il a toujours une grande importance pour nous. C'est pathétique d'avoir à entendre d'une autre personne que notre père est important pour nous pour en prendre conscience. Je me sens pathétique.
Avec le temps, avec les déceptions, on arrive à se former une carapace. Cette carapace fait en sorte qu'on arrive assez bien oublier qu'on a un père. On arrive à ne pas penser à lui pendant des jours, des semaines, voire des mois. On arrive à ne pas se sentir coupable. Puis, le jour de notre anniversaire, alors que la fatigue l'emporte et qu'on réalise qu'il n'a pas appelé, on ressent un trou dans la carapace. On prend conscience que ça fait pratiquement 5 mois que nous n'en avons aucune nouvelle. On prend conscience de la faiblesse de la relation père-enfant. Et la culpabilité nous prend. C'est fou de se sentir coupable après que notre père ait oublié notre anniversaire. Mais ce père est si habile pour remettre la faute sur les autres... Et on espère, on espère qu'il ait recommencé à boire et que ça excuse son oubli. On espère qu'il n'ait pas fait cet oubli à jeun. Puis on rêve de vengeance... la Fête des Pères approche. On est tiraillée pendant des semaines. Et on décide de ne pas se venger, parce que ça lui donnerait une raison de plus pour tout mettre sur votre dos. On appelle en un beau dimanche matin et comme personne n'est présent on laisse un message. Ensuite, on espère. On espère qu'il ne nous rappelle pas. On espère ne pas avoir à converser avec lui alors qu'il aura bu. On espère qu'il soit encore sobre. On en vient à espérer qu'il nous rappelle. On espère même qu'il ait changé, réellement. Et on réalise qu'on vit une nouvelle déception, parce qu'il ne pense même pas qu'il serait poli de rappeler pour remercier. C'est une roue qui tourne: espoirs, déceptions, espoirs...
Puis on se sent pathétique. Pathétique, d'être incapable de faire le deuil d'un père qui n'est pas décédé. Pathétique de réagir à chaque allusion qui nous responsabilise face à une relation père-enfant qui ne mène à rien. Pathétique, d'être incapable de s'asseoir avec son père pour lui verbaliser pour une Nième fois combien on se sent pathétique. Et enfin, on se sent pathétique lorsqu'on se dit que la vie aurait été plus facile, si, il y a 11 ans, il était mort dans cet accident...
samedi 21 juin 2008
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1 commentaire:
Je sais que ça n'aidera pas vraiment, mais je ne pense pas que c'est pathétique. Dur? oui. Triste? oui. Désagréable? oui. Humain? très. Mais pathétique, je ne crois pas.
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